lundi 30 juin 2008

la fin d'un voyage

Un père, une mère qui disparait, c'est une mémoire de perdue. Lieux-dits, personnages, familles sont oubliés.
"Maltournées, Terre aux pierres, Bois des jots, Pithoise, Chêne plat..."
"Le Ghis, le Totor..."
Ce qui relie encore au "passé vivant" n'est plus.
Ceux qui peuvent nous dire encore qui est qui, ont fait fuir dans leurs départs les fantômes des visiteurs du dimanche, les acheteurs d'avant les fêtes, les assoiffés de fin de journée !
En revenant d'avoir conduit ma petite mère à son Unité des Personnes Désorientées (UPAD), après l'avoir laissée avec les autres pensionnaires, après avoir répondu aux questions de la responsable sur le "dentier", l'ORL, le cardiologue, le dentiste "non, elle n'en a pas, elle n'a plus de dents), sur d'autres détails que j'ai oubliés, j'ai eu mal !
Et j'ai pleuré sur le regard apeuré de ma mère, devinant sans doute qu'elle n'était plus en visite mais qu'elle allait rester là !
Douleur de voir la déchéance,
douleur de voir la fragilité,
douleur de l'abandon.
J'espère de tout mon cœur que mes propres enfants n'auront pas à connaître ce moment là !
Ce jour où vous me prendriez par la main comme une petite fille, à me conduire à la porte de ma chambre et à m'y montrer qu'il y a mon nom !
Je l'ai fait, l'entendant me dire que c'est beau pour se persuader qu'elle y sera pour son bien, me brisant le cœur du regret de ne pas avoir su l'aimer assez fort !
Il faut du courage pour ne pas rebrousser chemin !
J'ai été étonnée que , durant le trajet , elle soit si calme, si sage et ne disant rien.
Savait - elle ce qui l'attendait ?
Car dans son inconscience, dans ce monde à elle, il y a des moments où surgissent des éclairs lucides, sans doute acides et qui mettent à vif la réalité de ce qu'elle est !
L'oubli du quotidien et de la réalité, c'est mieux et plus confortable, et cela s'appelle "Eilzheimer".
Et se levant de leur chaise, un sourire douloureux crispant leur si petit visage, attendant patiemment qu'on vienne les chercher, ils demandent :
" ça y est, tu m'emmènes ?"

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